À propos / About

« Photography is not about the thing photographed. It is about how that thing looks photographed. »

Garry Winogrand

 

 

Marc Gourmelon nous présente des petits riens avec sérieux, humilité, voire opiniâtreté. Ses images de choses délaissées et abandonnées interrogent sur leur raison d’exister en tant que sujets, et renvoient le spectateur à l’intention du photographe et à la valeur qu’il entend donner aux choses.
Le centrage forcené du sujet nous dit avec véhémence où guetter l’apparition de la valeur : l’image devient épiphanique. Nous sommes convoqués à assister à l’apparition de la valeur, obligés de fixer des yeux l’endroit où cette apparition doit se produire.
Marc Gourmelon montre un goût bienveillant pour la personnalité hirsute des choses et leur précarité: il témoigne de la volonté d’être des choses malgré tout, présence forcenée malgré le vide, rêve malgré la pauvreté, construction malgré le chaos, volonté malgré l’impuissance, vie malgé la mort, joie malgré la tristesse, possibilité d’amour malgré le délabrement des corps, étonnement de l’apparition, voire étonnement mis en scène du fait qu’on puisse soi-même y donner de l’importance : je trouve cela beau quoiqu’il n’y ait rien.
La réalité peut à chaque instant se dévoiler non pas en tant qu’autre Monde mais en tant que densification du Monde présent. Le sens des images de Marc Gourmelon touche donc plus l’attitude de celui qui regarde que la chose montrée. On trouve, au-delà du procédé classique des oppositions (il y a quelque chose là, et rien autour), un vocabulaire qui invoque des traces (il y a eu quelque chose là et rien autour), la confusion (où y a-t-il vraiment ?), l’utilisation d’écrans (il y a cette chose mais ce n’est pas pour moi), le relevé d’une complicité des matières et des formes (il y a à voir au-delà de l’usage des choses) voire carrément l’impossibilité finale de tout sens, quand on ne peut plus présenter que l’évidence, (le ciel bleu ou le ciel étoilé ne disent ainsi que l’émerveillement de leur apparition : IL Y A).
On reste ainsi longtemps silencieux et troublé devant les images de Marc Gourmelon : on observe ces chemins qui ne mènent nulle part, mais d’où quelqu’un viendra peut-être. On s’émerveille de la présence du moment. On sent en soi une réticence absolue à devoir s’en aller. On est là devant chaque image, figé, les deux pieds au sol, immobile et dans la stupeur.

Henri Peyre

 

Marc Gourmelon stages ‘little nothings’ with gravity, humility, and even resoluteness. His images question the existence of neglected and abandoned things as subjects and refer the spectator back to the photographer’s intention and the value that he wants to give to the subjects.
His obsessive centring of the subject states violently where to look for the appearance of value : the image becomes a revelation. We are invited to take part in the appearance of value, obliged to stare at where this appearance should take place.
Marc Gourmelon exhibits a benevolent taste for the shaggy personality of the subjects and their precariousness. He testifies to a desire for the subjects to exist in spite of everything, obsessive presence despite the void, dream despite poverty, construction despite the chaos, willpower despite impotence, life despite death, joy despite sadness, possible love despite bodily decay, surprise at the appearance, even staged surprise that one can actually place importance in it: I find that beautiful even though there is nothing.
Reality can reveal itself at any given moment, not as something otherworldly, but as a denser version of the current world. The meaning of his images affects the attitude of the viewer rather than what is being viewed. Besides the classic process of opposition (there is something there and nothing around it), we find vocabulary that evokes traces (something has been there, and nothing around it), confusion (where is it really?), the use of screens (there is this thing but it’s not for me), the summary of complicity between matter and form (there is something to see beyond the use of things), even the final impossibility of all meaning when all one can do is present the evidence (in this way, a blue sky or starry sky speaks only of the amazing fact that it has appeared: IT IS THERE).
We remain thus silent and disconcerted in front of Marc Gourmelon’s photos : we observe these paths that lead nowhere, but from where someone may come. We are amazed at the presence of the moment. We can feel within an absolute reticence to have to go. We are there in front of each picture, rooted, two feet on the ground, immobile and bewildered.

 

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                    Translated by Rachel Kaberry